Mon amie, la canne blanche

  

   Depuis décembre 2013, j’ai une nouvelle amie, une canne blanche, qui m’est indispensable lorsque je dois me déplacer seule ou dans un endroit que je ne connais pas.

   Je l’ai prénommée Bobinette; elle me devance, se promène de gauche à droite pour me guider et me prévenir de tout obstacle.

   Au cours de mes déplacements, avec guide ou sans, j’ai pu constater que Bobinette avait des ennemies farouches et bêtes comme leurs deux pieds. Elle pourtant si prévenante et qui ne demande qu’une seule chose… UN PEU D’ATTENTION.

 

   Ces antagonistes, qui en plus ne le savent même pas, sont les gens rivés à leur cellulaire, tablette, journal, ou toutes autres distractions qui les empêchent de voir clairement ce qui passe devant et autour d’eux. Bobinette les heurte et c’est moi qu’on invective; bien oui toi! J’ai besoin d’assistance et c’est de ma faute. Allo! La lune, ici la Terre.  Vous avez une bonne vision, servez-vous en intelligemment. Tous le monde ne s’en portera que mieux, voyant, malvoyant ou non voyant.

   Houston, pendant que je vous ai en ligne, y a un autre problème et celui-là est encore plus dangereux. Ce sont les personnes pressées. Vous  ne pourriez pas leur dire de lever un peu le pied de sur l’accélérateur? Tsé, quand ton accompagnatrice manque de se faire lutter par un individu filiforme qui descend un escalier; l’impact équivaux à celui d’un sumo qui est en colère.  Ce n’est pas juste une personne qui risque de se retrouver par terre et être blessé, mais au moins deux.  Ces personnes à vitesse Formule 1 ne connaissent sûrement pas la fable du lièvre et de la tortue et l’adage accompagnant l’histoire: « Rien ne sert de courir; il faut savoir partir à point ». De plus, les soupirs d’impatience, derrière moi quand je descend les marches, ne m’impressionnent pas ; je ne me casserai pas le cou pour vous.

   Il y a tellement de petites choses que vous pourriez faire pour aider les personnes handicapées visuelles et sans que cela ne vous coûtent un sou ou ne prennent de votre précieux temps.

   Dans les stations de métro, libérer le mur ou tassez-vous. Ne restez pas planter comme des piquets dans un champ qui attendent qu’une vache vienne s’y gratter le dos.  Vous me voyez bien, moi pas.

    Je fais attention mais je ne retiens pas Bobinette, si vos chevilles sont dans son chemin. Et en passant, je me fais un malin plaisir d’asticoter les jambes qui se trouvent juste devant les portes du métro quand je dois en descendre.  Ce n’est pas votre place de toute façon.

   Dans le wagon, je ne vois plus l’écriteau désignant le siège pour personne à mobilité réduite; si on ne libère pas un siège, je demeurerai devant les portes et n’essayez surtout de m’y déloger. C’est l’endroit le plus sécuritaire pour moi après un siège. Et si vous voulez m’offrir votre place, parlez-moi en me touchant; je suis concentrée sur mon trajet et sans mot, je peux penser que l’on m’attaque.

   Traverser les rues n’est pas toujours évident. Quand Monsieur le Soleil brille de tous ces feux, il m’empêche souvent de voir la lumière piétonnière, votre aide n’est alors jamais refusé; c’est même une bénédiction.  Offrez-moi votre coude et mon plus beau sourire accompagnera mes remerciements sincères.

   Et vous, les automobilistes n’êtes pas en reste. Respecter la priorité du piéton et respecter le couloir piétonnier. Les lignes blanches sur le bitume ne sont pas là pour l’enjoliver.

 

   Je n’ai pas écrit ce billet pour qu’on me plaigne, au contraire je ne fais pas pitié. Mais tout comme le commun des mortels, j’ai une vie et le droit d’en jouir pleinement et en sécurité le plus possible.

    Ah! Oui! J’allais oublier. J’ai une basse vision mais une très bonne ouie. Alors vos commentaires désobligeants, gardez les pour vous car j’ai assez de front pour m’arrêter et vous demander de m’expliquer votre problème avec mon handicap et de rester droit devant vous en attendant la réponse. Ce sera assez gênant pour vous car j’ai une voix portante.

P.S. En passant, mon ordinateur est adapté pour ceux qui pensent que les handicapés visuels ne peuvent faire de l’internet. Eh! Oui, il y en a une sacrée gang.

 

Bien bonne journée à vous.